Les ancrages du hasard

 

Raconter un lieu au travers des visages de ses habitants. Raconter leurs histoires suivant la démarche de l’instinct et de la découverte. Raconter l’espace par les regards des personnes et du photographe. Voici le processus entamé dans le quartier Lehon – Kessels objet d’un des récents contrats de quartier de la Région bruxelloise. L’objectif de la revitalisation urbaine passe par la prise en charge de la population qui en compose le tissu social. Le cas de Lehon – Kessels illustre la particularité de nombreuses communautés d’origine étrangère qui se juxtaposent sans conflits ni tensions et qui partagent l’espace du quartier mais surtout son identité. Ces personnes composent les différentes formes d’ancrage qui permettent de dessiner un visage spatial au travers du travail photographique. Les portraits nous parlent des personnes mais nous parlent aussi de leurs espaces.

Comme un récit, le fil qui lie une image à l’autre est dans le dialogue entre le photographe et chaque habitant. Ceux-ci ont envoyé Victor Levy chez une autre personne en construisant un parcours qui traverse les rues et les maisons mais qui nous révèle comme ce passage de bouche à oreille n’est qu’une manière de contourner la tendance à analyser et décrypter pour mettre plutôt en valeur un résultat construit sur l’hasard des rencontres.

Derrière les façades des maisons héritées d’autres époques, on découvre une vie intérieure qui ne correspond plus à l’exigence de se représenter vers la cité. On aperçoit la capacité d’adaptation et de refondation à partir d’une idée d’identité qui se construit par fragments. Les histoires des personnes rassemblées construisent les lieux, le regard du photographe et ses prises de vue nous parlent de la dimension universelle de l’ancrage, acte premier de l’habiter.

 

Morizio Cohen